ATTENTION SPOILERS PARTOUT

lundi 29 août 2011

Kafka Kalmar : une crucifixion - Billy Bob Dutrisac

Kafka Kalmar est journaliste à l’hebdomadaire à tendance rock Riff. Il mène une enquête sur le révérend Walter Warhead, télévangéliste à la mode américaine. Warhead prêche le credo habituel : les femmes à la maison, la drogue hors des écoles, Dieu aime le profit et n’aime pas les tapettes, etc. Justement, à force de trop regarder les émissions télé de Warhead, un homme vient de se trouver une vocation subite et se met à étrangler des homosexuels. Il tue un ami de Kafka Kalmar, Barlow Barkovitch, sous les yeux même de Kafka. L’enquête de Kalmar établit le lien entre Samuel l’étrangleur et le révérend Warhead. Petit à petit, Samuel tombera sous la coupe de Warhead et deviendra son tueur, son ange vengeur; tous les ennemis de l’Église sont des cibles, et à prime abord, Kafka Kalmar, parce que ses articles dans Riff sont absolument dévastateurs — car, en fait, le révérend Warhead vit à des années- lumière de ce qu’il prêche : il boit, aime le rock, force sa femme à se faire enfiler par le premier venu, il fréquente les néo-nazis et est acoquiné avec le premier ministre conservateur ; la panoplie habituelle, quoi.

Comme prévu les dangers mortels s’amoncellent sur l’enquête menée par Kalmar et quelques-uns de ses amis. La mort frappe violemment et le climat se fait de plus en plus menaçant au fur et à mesure que les révélations (c’est le cas de le dire) et les événements viendront alourdir le dossier de Warhead et de son dangereux sous-fifre Samuel. Mais l’empire de Warhead s’écroule brutalement quand les mensonges du révérend tissent autour de lui un filet auquel Samuel ne peut plus s’accrocher. Samuel tue Warhead, qui est en retour abattu par la police.

Kafka Kalmar reprend ses activités au Riff après une période d’accalmie.

Dutrisac a manifestement un style et des choses à dire, même si l’histoire racontée se situe dans une certaine banalité grotesque. N’importe quelle histoire est une bonne histoire si elle est bien racontée, et si elle est formidablement racontée, elle devient prenante et haletante. Ici, pas de ça. Dutrisac est prisonnier d’un style tape-à-l’oeil, simili-baroque et punché, au fond très as-tu-vu-la-trouvaille-et-le-jeu-de-mots que voilà. Ces breloques stylistiques mettent une distance entre le lecteur et les personnages. C’est bien dommage car on n’aurait pas demandé mieux que de croire en eux. Triste, triste, mais comment accorder crédit à des personnages affublés de noms tels : Kafka Kalmar, Brooklyn Cholestérol, Simone Siamois, Zen Rhododendron, Gordon Goosewalk — cette affectation est ridicule et diminue l’intérêt du lecteur pour cette fiction.

C’est d’autant plus attristant que, par moments, lorsqu’on arrive à passer outre ce ridicule, on reste à peu près captivé. Dutrisac est un jeune romancier, il va apprendre à ne pas tenter de voler la vedette à sa propre création.



Kafka Kalmar : une crucifixion
Billy Bob Dutrisac
1989, Québec/Amérique
édition originale 1989
290 pages
lecture : mai 94

À noter : cet ouvrage est sorti ultérieurement en réimpression sous le titre : La crucifixion de Kafka Kalmar et signé du vrai nom de l’auteur, Benoît Dutrizac.

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